Portraits, Icônes & Figures de Claude Lefebvre
Le pinceau à deux têtes
C’est un étrange pinceau bicéphale en poil d’écureuil, monté sur une plume d’oie ligaturée sur un manche en bois. « Le plus ancien de la maison » commente Claude Lefebvre en fouinant dans un grand bocal où patiente une forêt d’instruments chevelus. « Ce pinceau à deux mèches sert à faire les veines de marbre en trompe l’œil. Il doit avoir quelque chose comme trente-cinq ou trente-six ans, mais il m’est encore utile de temps à autres. » Claude est un grand conservateur. Chaque objet, et dieu sait si l’atelier de l’artiste, où flotte un parfum d’essence de térébenthine et d’huile de lin, est peuplé du sol au plafond, chaque poil de martre, chaque morceau de tissu, peut raconter une histoire. La toile de billard qui recouvre la table à encrer provient d’un grand café d’Alençon, où le peintre a eu ses habitudes dans une autre vie. Le cendrier est une pierre à encre. Mais, on le sent d’entrée en franchissant la vitre coulissante de cet ancien garage en pierre, tous les pensionnaires muets de l’atelier ont un point commun : la singularité de leur matière. Tout respire ici le bois, le cuir, la toile de lin, le cuivre ou la terre de sienne.
Philippe Dossal – La Voliais, Janvier 2013
Lorsque nous parlons de « portraits », pour nombre de gens le premier réflexe privilégie la ressemblance comme une sorte d’évidence incontournable. Mais, à bien y regarder, l’observation et la connaissance que nous pouvons avoir d’une personne, d’un proche, d’un parent, d’un ami, les multiples facettes que les photographies de famille — par exemple — nous offrent, sont autant d’angles différents parfois surprenants de la physionomie de chacun…
Nous pouvons aisément nous rendre compte qu’ici, le frère ou la sœur, sont fidèles à l’image gardée, gravée dans nos souvenirs, mais lui, ici, ou elle, là, s’en éloignent. On peut se dire : « La photo est ratée – Je ne le retrouve pas »… La photo n’est pas plus mauvaise ou meilleure… Non. Alors, nous comprenons que la véritable ressemblance est ailleurs.
Le peintre la recherche autrement. Goya disait que l’observation des traits, des détails, donnaient leur accent aux ensembles qu’il imaginait. Pour le peintre, en citant Malraux – dans les voix du silence – Le portrait advient et commence là où s’arrête la reproduction des traits.
Il y a donc une différence fondamentale de perception, de langage. Nous réalisons d’abord un tableau et très souvent le modèle n’est que prétexte.
Le portrait ce fait figure.
Claude Lefebvre
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