Le Petit Véhicule au Festival Voix Vives de Sète
Le Petit Véhicule sera présent au festival Voix Vives à Sète, du 22 juillet au 30 juillet 2016.
Présentation du festival :
Chaque année au mois de juillet, le Festival de poésie VOIX VIVES, de Méditerranée en Méditerranée accueille à Sète plus de cent poètes venus de toutes les Méditerranée. Ils sont entourés d’artistes, conteurs, musiciens, chanteurs, comédiens qui offrent avec eux une approche plurielle de la parole poétique.
De nombreuses rencontres sont proposées chaque jour dans des lieux accessibles à tous : places, jardins publics ou privés, rues, lieux du Patrimoine situés dans une partie historique de la ville retenue pour être Le Village du Festival.
De la voix des poètes issus d’une Méditerranée à la fois une et multiple, retentit une parole de paix, de regards sur le monde, de questionnements, de rencontres entre les cultures, de bonheur du partage.
Directe, synthétique, ronde ou crue, murmurante ou hurlante, la parole des poètes révèle d’emblée les évidences que parfois on ne sait ou n’ose formuler. Evidences enfouies dans le quotidien qui aveugle, sous la crainte qui jugule le dire.
Parce que la parole des poètes crie toutes les vérités, tous les drames, tous les bonheurs, les nôtres, ceux des autres, ceux de l’autre, elle est nécessaire. Comme peut l’être l’eau à une terre desséchée, à un corps meurtri, à une bouche assoiffée.
Changer de cap vers la librairie du vent
et la galerie de lʼor du temps
« Avec leur tristesse et leur faim
leur tentation et leur fatigue
Ils étaient là pour écouter
la parole du boulanger
C’était le miracle du pain
La multiplication des hommes »
Serge Wellens
On croit choisir mais on est choisi. L’association des éditions du Petit Véhicule que j’anime depuis des lustres se doit de changer les donnes de son fonctionnement si elle veut continuer son existence. Il n’est plus possible d’être sur tous les terrains d’une maison d’édition généraliste. Ce rêve unitaire d’une petite maison d’édition associative, faite de paroles, de signes amicaux et fraternels et d’échanges, n’existe pas dans la durée au bout du compte sinon dans la réalisation de projets concrets et tangibles, même de courtes durées.
En raison de cette situation, une nouvelle donnes’impose pour préserver les sentiers de la joie de créer entre un artiste et un éditeur,fût-il associatif. Humblement et modestement. Nous réaliserons de petits tirages hors du système classique de distribution car cʼest mission impossible de vendre aux libraires. Il est difficile de suivre par ailleurs les dépôts-ventes. Nous ne faisons pas partie du système. C’est ainsi. Trop d’auteurs pensent être dans une grande structure et exigent ce qu’elle ne peut offrir : la diffusion massive et la gloire fantasmée. Cʼest ainsi. Ajoutons à cela que les subventions municipales nantaises qui permettaient à nos revues de naître et de vivre ont été brutalement supprimées du jour au lendemain. La crise existe mais a bon dos. Tout pouvoir a une tendance naturelle à écarter tout ce qui peut chanter la terre promise ou exprimer une autre voix. C’est ainsi. Ne parlons pas des banques, aujourd’hui tout y est soumis à la réalité du chiffre argenté. Le contenu de votre activité économique n’intéresse pas, votre personne encore moins. On vous vend des produits. Nous sommes les pigeons du Dieu – Argent de la rentabilité. L’argent est devenu un but en soi et non plus un moyen de vivre. Je vous invite à lire Léon Bloy Le Sang du pauvre et le Cantique du soleil de Saint François d’Assise pour comprendre qu’il y a d’autres richesses. ” Le capital… joue aux dés notre royaume ” dit Léo Ferré et la culture com du loisir, en nous proposant un miroir aux alouettes vole notre âme et “la liberté des feuilles” selon lʼexpression de René Guy Cadou. On a l’impression plus que réelle que nos élus-décideurs ne connaissent pas la réalité du terrain. Ils ont oublié que sur la table le peu que nous avons, nous, on sait le partager. Et une culture proche du cœur et de l’esprit a aujourd’hui besoin de cela, car il existe une République des lettres fondée sur lʼécole de la parole et du sentiment partagé. La littérature et la poésie disent lʼhomme, son amour et sa révolte. Les bureaucraties culturelles en ont-elles le soupçon ? Il est donc indispensable de changer nos façons de vivre un catalogue. Finie donc l’idée d’une maison d’édition généraliste, finie l’idée que nos livres peuvent être chez tous les libraires. C’est ainsi. En revanche, si la librairie achète nos livres fermement, c’est oui ; si un client lecteur achète un de nos livres c’est oui ; si un libraire veut organiser une signature, c’est oui. Nous serons à l’avenir présents essentiellement dans les festivals ou marchés du livre pour les ventes directes, pour une conférence dans un lieu culturel, une galerie dʼart, dans un café, ou par notre blog pour rencontrer les gens vraiment intéressés. C’est pour cela que toutes nos collections sʼarrêtent et nʼaccueilleront plus de livres. Seule restera la belle collection : La Galerie de l’or du temps associant textes & images, format 21×21 cm relié à la manière chinoise, fait à la main et à tirage limité renouvelable au fur et à mesure des besoins. Demeurent aussi nos revues : Incognita, Les Cahiers des poètes de l’école de Rochefort, Les Cahiers d’études Léo Ferré, Chiendents et l’Almanach. Enfin, nous développerons les documentaires filmés concernant les auteurs avec qui nous travaillons en harmonie. Celui qui écrit et signe cette lettre nʼa pas eu lʼhonneur dʼavoir une réponse directe de Madame la Maire de la ville de Nantes, à qui était adressée une lettre ouverte, forte sur les enjeux de la Culture. Cʼest ainsi. Et pourtant notre petite maison dʼédition a eu au moins un grand prix littéraire : le prix de la carotte bleue décerné par le public connaisseur des lapins lecteurs. Son animateur principal, poète et écrivain, est célèbre chez les fourmis rouges, les libellules bleues et les hiboux de la nuit. Et on nʼen tient pas compte ! Il s’agit donc d’être sur les sentiers de la joie de créer et d’aller à la rencontre de lecteurs curieux, vraiment curieux, quʼils soient élus du peuple ou non… C’est ce que le Petit Véhicule a choisi. Il y va dʼune certaine liberté et dʼune indépendance dʼêtre au monde. Ainsi nos auteurs retrouvent la totalité de leurs textes et de leurs droits. Leurs livres, s’ils le souhaitent, peuvent désormais être édités dans notre seule et unique collection : La galerie de l’or du temps.
Luc Vidal
Pour aller plus loin :
– Site officiel du Festival Voix Vives à Sète
Bonjour Luc,
J'ai lu ta missive avec soin. Ton choix éthique guidé par "une certaine liberté et une indépendance d'être au monde" me touche infiniment et j'adhère définitivement au "parti" des fourmis rouges, libellules bleues et autres hiboux ! Nathalie
Bravo, Luc, tu parles d’or ! Et bon vent aux vives voix de Sète, hospitalières…
Jacques
Superbe, ton texte, Luc ! Tu as raison, créons nous-mêmes l'or du temps que l'on nous vole de plus en plus au quotidien !
Merci pour l'invitation à lire ou relire Saint-François d'Assise (que j'ai fréquenté, un temps ! et qui persiste à être un très grand modèle pour ma vie (notamment sa relation aux animaux…). Et Léon Bloy, que je ne connais pas, et que je vais donc m'appliquer à découvrir. En ce moment je travaille sur Marguerite Porete, "Le miroir des âmes simples et anéanties", dans l'ambition (!!!) peut–être irréalisable (?) d'écrire progressivement un recueil poétique à partir de la vérité de ses mots (vérité nue de ses mots).
Ça fait plaisir de voir qu'il y a au moins quelques humains qui font le lien entre une nature de grands mystiques, où ils trouvent à juste titre la belle Humanité et le bel Humanisme, et la pensée dite "de gauche" (si elle existe encore…). Au lieu, comme c'est le cas, pour une raison qui m'a toujours échappée, la plupart du temps de les opposer.
Bon séjour à Sète.
Ghislaine
merci beaucoup pour votre réflexion.
Salutaire et constructive, malgré l'air du temps ambiant
et le contexte éditorial, où la création n'est pas toujours très
accompagnée par la concentration de la diffusion-distribution
et une médiation aussi déséquélibrée, qui ne profite souvent
qu'à des livres jetables.
Pour la poésie et la littérature vraiment contemporaines, elle est
carrément ignorante ou du moins aux abonnés absents.
Je vous souhaite de bonnes Voix Vives.
Bien à vous,
Jean Gabriel