Le voyage immobile / die Regungslose Reise, de Alain Fabre-Catalan & Eva-Maria Berg (dessins : Jean-Marie Cartereau)
Le voyage immobile
Die regungslose Reise
Alain Fabre-Catalan & Eva-Maria Berg
dessins de Jean-Marie Cartereau
Le silence même n’est plus à toi En ce lieu où les meules ont cessé de tourner.
Das Schweigen selbst gehört dir nicht mehr An diesem Ort, wo die Mühlen aufgehört haben sich zu drehen.
Georges Séféris
Ainsi, la tâche de l´écrivain ne peut être de nier la douleur, d´effacer ses traces, de la masquer. Il doit – au contraire – la reconnaître et encore une fois, afin que nous puissions la voir, la saisir dans sa vérité.
So kann es auch nicht Aufgabe des Schriftstellers sein, den Schmerz zu leugnen, seine Spuren zu verwischen, über ihn hinwegzutäuschen. Er muß ihn – im Gegenteil – wahrhaben und noch einmal, damit wir sehen können, wahrmachen.
Ingeborg Bachmann
Table
Le pas du poème Der Schritt des Gedichtes 7
I. Le voyage immobile Die regungslose Reise 11
II. Die regungslose Reise Le voyage immobile 39
III. Le voyage immobile Die regungslose Reise 53
Coda 59
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Le pas du poème / Der Schritt des Gedichtes
Où sont-ils passés les disparus, ceux qui nous reviennent en mémoire, malgré l’effacement de leurs pas, ces pas offerts à la neige, cette présence perdue qui finit par creuser un chemin où se découvre l’étendue même du désastre ? C’est dans ce pas, qui vient nous rappeler le tragique de l’histoire où seul l’indicible témoigne de ce qui fut sans mesure, qu’il s’agit de placer le tremblement de l’écriture et ainsi de descendre au plus près de « la trace impossible à confondre », à l’image de l’herbe endeuillée dont chaque brin conserve l’empreinte d’une viesacrifiée et d’une mort sans sépulture. Qui tente de s’approcher de ce passé en suspension au coeur de notre histoire, doit entreprendre la traversée de ces couches de temps qu’il faut retourner sans relâche pour atteindre le sol où tant de pas se sont dérobés. C’est avec les mots de la poésie portant le masque tragique du 20ème siècle que s’éveille la hantise de l’ombre qui menace à travers les pierres du temps, ces ruines dont l’ultime témoignage est couché à même la terre défigurée sous les dalles de ciment de Birkenau.
(extraits)
Contre le feu de l’oubli, la litanie des noms est la seule réponse.
Wider das Feuer des Vergessens, ist die Litanei der Namen die einzige Antwort.
Le visage du temps balbutie
jusqu’à n’être plus
qu’un froissement de feuilles emportées par le vent,
fumerolles où s’agrippent les corps absents.
Das Gesicht der Zeit stammelt
bis es nur noch
ein Rascheln von Blättern ist
davongetragen vom Wind,
Fumarolen, an die sich die abwesenden Körper klammern.
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