Légère, de Roger WALLET
ROGER WALLET
Légère
roman
photographies : JEAN-DENIS BEUCHER
modèle : JESS
préface : YVES POTOSKI
après-lire : LUC VIDAL
A. et « A. »
Un ex-voto
Ce texte, il aurait aimé ne pas le publier « de son vivant ». Non qu’il ait scrupule à parler de cette «A. » (il en parle depuis… cinquante textes, cent ?) mais parce qu’il ne voulait pas en être dépossédé. Or éditer, livrer à la lecture, c’est se déposséder.
Quand il me le donna à lire, il me fallut deux heures pour aller d’émotion en émerveillement devant la splendeur d’un tel amour, et deux semaines pour m’en remettre. C’était trop d’émotion pour moi. Comment survivre à un tel déferlement de tendresse et de passion ?
« En écrivant, me répondit simplement Roger. Je ne connais aucun autre moyen. » J’ai fait la connaissance de «A. » très vite après leur rencontre – je ne parle pas de la jeune femme en question mais de celle-ci qu’il écrit, et qu’avant d’écrire il m’a dite, racontée – et depuis ce jour inaugural de la première lecture, elle ne l’a pas quittée. Je me suis fait, de A. (la « vraie »), l’image d’une femme ardente et forte, d’un courage magnifique. Pourtant c’est de «A. » que je suis tombé amoureux à la lecture de « Légère ». La romanesque, celle de la fiction. Fiction ? Elle a pris corps pour moi, je la vois, je la sens, je la devine. Elle n’existe que là.
Yves Potosky ( extrait de la préface)
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Un oiseau passe très près de l’âme
Légère, ce court et profond roman de Roger Wallet, c’est la lente montée des eaux de la mémoire vers les phrases lointaines et émerveillées qui circulent dans l’air du temps. Temps d’aimer, temps d’oublis, temps des renaissances et des reconnaissances. Peut-être. C’est le double « tu » qui interpelle et l’auteur et l’amante à la manière du célèbre roman de Michel Butor, La Modification. Le phrasé des lignes de ce roman est musique car l’amoureuse « était dans la poitrine le tam-tam du paradis ».
Chez Roger Wallet le style d’écriture, j’allais dire sa grammaire créative permet l’analyse détaillée d’un sentiment, d’une sensation sans jamais intellectualiser le sentiment ni la sensation. Toutes les ressources de l’art d’écrire, de conjuguer sont au service du récit et des personnages, de la vie, dit autrement. L’usage du participe présent – notez présent – dans Légère est de ce point de vue significatif et rend les choses visibles, délicatement, lentement. Le savoureux, le réel, l’onirique, le sensuel… sont autant de clés pour la mise en relief des personnages
Luc Vidal ( extrait de après-lire)
Sa voix — Elle, une voix haute et forte. Pas aiguë, pas pointue, mais haute. Et sèche. Pas cassante, pas brutale, mais énergique. Elle lit beaucoup. Aimant – toi – quand elle te fait la lecture. Aimant la sentir tendue, concentrée sur son texte : la voyant comme elle est ailleurs, quand elle n’est pas sous tes yeux. Elle, une façon d’éclairer un texte rien qu’en le lisant. Elle, disant les mystères, ne les levant jamais. Disant les nuances, ne les commentant pas. Quand elle te parle, elle, prenant souvent une autre voix, plus basse, plus grave. Déchirée le dernier soir, au moment des aveux. Les silences se précipitant entre les mots, tu les as pris pour un dernier cadeau. Quand elle pleure, elle, dans la voix, toute la détresse du monde. Implorant consolation. La consoler est un privilège, tu le sais. Pas d’adieu entre nous, qui de vous deux le dit ?
Roeger Wallet ( extrait de Légère)