Baby Blues de Geneviève Liautard & Patrick Aubert (Photographies)
Geneviève Liautard – Patrick Aubert
Baby blues
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Il est possible que l’image juste, l’image immédiatement parlante, soit
celle qui mystérieusement permet de remonter à une homophonie secrète et
enfouie dans la langue, l’homophonie dont toute la langue
(et le poème) procède.
Laurent Albarracin – In De l’image 2
Écrire de la poésie cela peut être raconter des histoires : vécues, rêvées ; c’est aussi partager des expériences, des visions qui ont besoin de mots pour s’inscrire dans le poème.
Les images de Patrick Aubert ne figent pas le temps ni n’arrêtent notre regard. Elles racontent elles aussi des histoires. Lors d’une exposition Cézanne ˆ l’Orangerie, Henri Maldiney qui s’était senti en quelque sorte “appelé” par un tableau, explique : “il m’a imposé une dimension de la réalité qui était en relation directe avec celle de mon existence. Je me suis senti exister en présence d’une œuvre.
Dans cette co-présence où nous nous trouvions cette oeuvre unique et moi unique, et tous les deux en cette présence communiquant ou plutôt con-naissant l’un avec l’autre”. De la même manière, les images qui ont inspiré la première suite poétique de ce recueil ont eu pour effet de déverrouiller chez le poète que je suis, quelque chose déjà en moi, une vision du réel, avec ce que cela comporte de trouble voire d’effroi mais aussi de profonde empathie.
Car les images de Patrick ne disent pas tout, ne sont pas réductibles à elles-mêmes. “Elles laissent ˆ l’insaisissable sa part”. C’est cet insaisissable situé à la frontière mouvante de l’impossible et du compréhensible qui se mêle à l’encre du poète dans un va-et-vient nourricier, faisant reculer les limites du langage, cet insaisissable qui chemine enfin sur la page, en déposant parfois une touche d’ombre, parfois une fragile lumière.
Geneviève Liautard
Geneviève Liautard – Poète et traductrice
Après des études d’anglais et une carrière d’assistante de direction à Marseille, elle vit actuellement dans le Var, se consacre à l’écriture et à la traduction.
Cofondatrice de l’association Motissage qui regroupe des animatrices en ateliers d’écriture, elle a mené pendant 10 ans un travail en direction des enfants et des populations défavorisées.
De la terre varoise où elle est profondément ancrée par ses racines paternelles, au delta du Rhône emblématique de l’empreinte maternelle, elle a fait un terreau qui nourrit son écriture poétique.
La découverte de l’oeuvre de Philippe Jaccottet fût décisive dans l’orientation de son travail poétique “entre jubilation et ignorance”.
Patrick Aubert – Photographe et plasticien
Né à Draguignan (France) en 1973.
Après des études supérieures en science de la vie et de la terre, il s’oriente vers l’éducatif et le social. Il est actuellement fonctionnaire territorial, responsable d’un service Education Jeunesse Citoyenneté dans une ville du centre Var (Saint Maximin la Sainte Baume).
Parallèlement, il mène sa pratique artistique au quotidien : pour lui être artiste ne se décrète pas. C’est une façon d’être au monde dans chaque instant de sa vie. Ainsi, il trouve toujours le temps pour passer de l’état d’esprit, par nature immatériel, à l’acte créatif, qui renvoie à la réalisation matérielle de l’oeuvre. Celle-ci n’étant pour lui, que la concrétisation physique d’un instant T, d’un vécu sensible permanent.
Il trouve dans ces deux approches, l’une professionnelle ancrée dans l’hyper proximité avec la vie des gens et l’autre artistique, beaucoup plus universelle, une complémentarité indispensable à son équilibre personnel.
Biographie
Tu appelles l’enfance
et c’est le vide qui répond
Le vide dit le poète est de l’air qui se mêle à l’air
un creuset plus empli que l’espoir
mais tu n’en sais rien
Vide et plein
Comme la chevelure indécise de l’aube qui se dénoue
Plein et vide
Comme celle du crépuscule qui se noue
Tu rappelles l’enfance
mais ton corps te précède
ne sait plus
où accrocher sa mue
offre une face claire une face sombre
comme le tremble dans le vent
Tu ne reconnais pas ce visage dans le miroir
le voudrais autre et le même à la fois
contour flouté que tu cernes de noir
Enfant et femme à mi-chemin
tu essaies de faire ton travail de vivre
en traînant les pieds
Tu appelles l’amour
mais la réponse
reste inaudible à ton coeur
Devant toi des êtres gesticulent
ouvrent et ferment leur bouche
comme poissons ferrés
(extrait)
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