“Un été avec ma mère” de Marie Malaval
« Même si le ciel est bleu et qu’on est en vacances, la fillette est triste.
En bas de l’escalier en pierre, elle est assise, la gorge serrée, attendant que la porte de la chambre se rouvre. Là-haut, maman s’est enfermée avec son cahier. Qu’y écrit – elle aujourd’hui ?
Comme après chaque dispute, elle monte dans leur chambre et s’y enferme. En bas dans la cour, les voix habituelles de Lucienne et de ses enfants. Des voix stridentes, sans tristesse, des ciseaux qui fendent l’air alourdi par le silence de maman.
Une fois, le coeur battant, elle a trouvé et ouvert le cahier. Une carte postale de la baie d’Alger en est sortie, rassurante: tonton Jeannot, là-bas, à la guerre d’Algérie. Pourvu qu’il ne se fasse pas tuer comme Marcel D., vingt ans, tout le village en deuil et sa mère qui devient folle.
Les pages remplies de l’écriture de maman, elle n’a pas osé les lire. C’est un cahier secret, il ne faudrait pas que quelqu’un la surprenne ».
( Extrait page 4 )
Après s’être longuement impliquée pour la défense de la langue allemande en tant qu’enseignante, en Seine-et-Marne et au lycée Paul Valéry de Sète, et en tant que co-auteure de neuf manuels d’allemand aux éditions Bordas et Larousse, Annie Philippe trouve un accomplissement tardif – mais intense – dans l’écriture de deux récits autobiographiques, aux éditions du Petit Véhicule, sur son enfance paysanne en Aveyron et son adolescence en pension à Millau.