Ce vêtement bleu que tu portes sur tes épaules tissé dans l’étoffe du temps Les ailes de l’occident aimant tes bras d’Orient sur le balcon de la nuit promise Les mains de la nuit caressant ton visage dans la maison du verbe aimer Tes paroles : « je suis dans le bus et t’appelle quand j’arrive » les mots d’un poème te berçant heureusement sous le cèdre d’un pays réconcilié leurs palabres signant des refrains subtiles et enchanteurs
Cela
Un rêve rouge-mandala dans une yourte Des mains sûres qui décompliquent le doute La mer en allée avec Rimbaud à la clé Un art du toucher vrai comme les doigts mélancoliques du couchant des enfances reconquises avec les cris sincères du silence La Fleur inverse qui floconne dans le ciel-miroir de l’âme Un temps de neige imprévu qui rafraîchit la mémoire Un feuille à feuille précieux comme des chandelles de la nuit Le poète-Prince Jaufré Rudel qui inventa l’amour de lonh et qui aima au XII ème siècle une princesse libanaise
Ceci
La poésie rêvant d’une femme photographe qui pour le sourire d’une rime dégraphe son corsage de nuit et de folie La poésie est une pierre noire qui voudrait faire son lit dans ta chevelure et ton sexe secret de la lumière Une blessure où meurt la mer comme un chagrin de chair d’après Léo Ferré Une histoire fantastique comme un drap qui vous enveloppe dans La fée aux miettes de Charles Nodier
Cela
Un oiseau bleu couleur du temps entrant par la fenêtre Une chambre d’échos sur la partition de la journée Un refrain égaré dans les baisers du silence Une femme diaphane qui fait chanter le silence Un petit garçon qui plonge ses regards dans les yeux d’un petit chat Richard taillant et murmurant à cor et à cri les émaux de son théâtre Axel Toursky Un dessert guadeloupéen baptisé tourment d’amour L’ombre d’un dieu qui te hèle sur les ailes du temps et qui vibre dans la poésie de Zahra Mroueh Un poème Némesis pour que l’aventure mesure et vérifie la folie d’un poème L’amour, la mer, la mort affichés aux trois fenêtres de la chambre du poète Charles Cros Etreindre le secret des mots dans leur bogue impénétrable et traduire comme une invention de la clarté la nuit des palabres
Ceci
Un carré d’as gravé sur la table de songes Un feu circonscrit par le verbe chérir de la belle folie Ce sentiment majeur qui fleurit dans le creux des ventres Un vent fou qui sème les grains des mots dans les soleilstudes du coeur Des oiseaux nocturnes qui comprennent la mélancolie d’un chien perdu Les couleurs d’un rêve qui cherche sa photographie La marque sublime des «vérités premières de la terre»* Le noir intense et irisé à la naissance des vrais baisers Un grand élan vif et étoilé quand tout semble en dormance Le rire des voyelles sous la lampe dans la bouche gourmande d’une femme Iselberg** ou un poète qui connaît la musique des mots anciens
Cela
Un signe lumineux et insondable comme l’énigme du plaisir et du sans nom Ce livre oublié dans les bras accueillants de l’avenir Une barque à la dérive qui ne perd jamais le nord La vie rêvée écrite et sublimée par le Prince des lisières René Guy Cadou L’infinie solitude des carapaces qui n’écoute plus les chansons d’amour Des mots qui conspirent pour la liberté des hommes La solitude qui boit une gorgée de tendresse à la santé des amants le chant des oiseaux qui parfume les villes Ceci & cela ou Cela & ceci La poésie qui va où le vent la mène parce qu’elle est le vent même Les lumières d’Espagne quand Góngora fait alliance avec Lorca Des portes battantes au détour du chemin ouvertes par le clair sourire de Robert Desnos Une épaule nue qui accueille la vérité des phrases et leurs fleurs de sang Des ferments de nuit avec un chagrin à la fenêtre d’Eurydice Des cerisiers noirs des stères bleues dans l’été indien d’Amérique avec Walt Whitman à notre chevet des « fées aux cheveux verts qui incantent l’été » selon Guillaume Apollinaire Un poème fauve qui ne sera jamais écrit par la mélancolie de l’automne Benjamin Péret traduisant Octavio Paz en Pierre de Soleil*** Un jardin-Paraclet qui fait rugir les coquelicots persistants du langage Des mains prospères qui touchent la peau de ton corps astral Une pénombre bleue qui libère le miracle d’aimer Ceci & Cela ou Cela & Ceci c’est larguer les amarres sur des chemins étoilés Luc Vidal, décembre 2019 janvier 2020, à Nantes
* Ce court extrait vient du livre de Zahra Mroueh Comme un chant égaré, Petit Véhicule ** Iselberg est le titre d’un livre de Claude Bugeon, Petit Véhicule *** Péret a traduit Octavio Paz, éd. Gallimard in Liberté sur Parole
Il est possible que le livre soit le dernier refuge de l’homme libre.
« Il est possible que le livre soit le dernier refuge de l’homme libre. Si l’homme tourne décidément à l’automate, s’il lui arrive de ne plus penser que selon les images toutes faites d’un écran, ce dernier finira par ne plus lire. Toutes sortes de machines suppléeront : il se laissera manier l’esprit par un système de visions parlantes : la couleur, le rythme, le relief, mille moyens de remplacer l’effort et l’attention morte, de combler le vide ou la paresse de la recherche et de l’imagination particulière : tout y sera ,moins l’esprit.