“Truc” de Lucien Grand-Jouan
Préface
Je voulais m’endormir et n’y arrivais pas. Alors j’ai noirci une page blanche par habitude comme un automate afin de mettre de l’eau dans la pompe pour l’amorcer. Mais les souvenirs semblaient loin- tains. Le monde dans sa torpeur s’évanouissait. Le sourcier s’était-il trompé ? La source ? Les étoiles ?
Et puis subitement vous etes arrivés comme par miracle, comme par enchantement. Je ne comptais plus sur vous. Ma maison était vide et silencieuse. L’accident ? Le réveil ?
Vos visages étaient jeunes et illuminés, doux comme des soirs d’été. Vous êtes venus des quatre coins de la terre, un, deux, trois, quatre, cinq, six, j’étais un peu affolé et vous avez crié :
« Nous sommes des amis qui volons à votre secours ! Nous avons quelque chose à dire… Nous vou- lons parler ! Oh ! Pretez-nous votre stylo, s’il vous plait ! »
Je vous ai alors comptés. Vous étiez 365 ! Tous originaux. Tous avec des prénoms différents et avec vos preuves à l’appui. C’était une chance ! C’était bien ma chance ! écrire par votre voix, écrire avec le sang des autres !
« Ne vous bousculez pas, dis-je, vous parlerez chacun à votre tour. Je suis un démocrate ordonné ! »
Ainsi, chers lecteurs, mes bienvenus protégés, vous avez écrit votre premier livre et je vous en remercie. Si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je percevrai quand même les droits d’auteur, car s’il fallait les diviser par 365… étant donné (chut !) que les éditeurs ne sont jamais très généreux, nous pourrions tous nous brosser !
D’ailleurs ne vaut-il pas mieux un heureux que 366 mécontents ? De toute manière, je vous paierai à boire au soir du 14 juillet… Oui, à tous et sans exception et meme à Truc s’il veut bien venir. De nos rapports mutuels, toute vénalité est exclue. D’ailleurs votre gentillesse et votre complaisance ne peu- vent pas s’acheter. Il y a des curiosités qu’on ne peut trouver dans des magasins. Votre cœur, votre âme vous me les avez prêtés. Ainsi vous êtes devenus les 365 adhérents de ma nouvelle école d’inutilité marginale et de sous-réalité comique voire cosmétique ou cosmique absolue.
Quand vous vous relirez, j’espère que vous y prendrez du plaisir. Pour les griefs ? Pour les critiques ? Vous les supporterez seuls, vous assumerez seuls l’entière responsabilité de vos erreurs. Je n’ai été que votre bras et vous étiez mes muses. Tantôt Thalie, tantôt Melpomène ou Erato… Même Polymnie est venue et Terpsichore nous assistait. Euterpe et Clio étaient bien sûr aussi présentes ici et là. Ainsi avec tout ce beau monde, comment n’aurions-nous pas eu une excellente compagnie? Merci donc mes doux braves. Si j’ai changé un peu vos habitudes, rabaché des vérités éculées, massacré des idoles, modifié la conception traditionnelle du livre… vous ne vous en prendrez qu’à vous-memes !
Vous étiez atteints et bouffés par le virus de la révolte lymphatique, de la réaction passive, de la colique verbale, de la littérature publicitaire morose ou petite-bourgeoise introspective. Vous voici bien soulagés ! Alors vive le révolté réactionnaire progressiste !
Pauvre francais. Salut aussi à TRUC ! Après tout, il n’est jamais trop tard pour bien faire.
Lucien Grand Jouan
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